6 - Tenir dans les tranchées
Au front, les soldats vivent dans un environnement déshumanisé, où le voisinage de la mort est permanent. Impuissants devant l’intensité du feu, ils sont aussi exposés aux aléas climatiques, au manque d’hygiène et de sommeil. L’arrivée de la « popote » et du courrier constituent deux moments forts de la journée du « poilu », mais celle-ci comporte aussi des moments de routine. L’écriture d'un carnet personnel ou de lettres permet de supporter la contrainte et de maintenir un lien essentiel avec l’arrière. On a estimé que quatre millions de lettres circulaient chaque jour pour un total de dix milliards échangées pendant la durée de la guerre.
Les journaux de tranchées, élaborés près du front, sont encouragés et surveillés par la hiérarchie militaire. Sous une forme fréquemment humoristique, ils ont pour but de distraire les combattants et d’entretenir le moral des troupes. C’est dans ce même objectif que le commandement organise des représentations théâtrales. A partir de juillet 1915, se développe également un système de permissions régulières qui permettent de sortir des combats et de retrouver provisoirement les siens.
L’adaptation au quotidien du front passe aussi par des activités manuelles ou créatives. Dans les moments de calme, nombreux sont les soldats qui façonnent des objets ou esquissent des croquis ; d’autres, qui possèdent un appareil photographique, choisissent de prendre des vues de leurs camarades ou des zones de combat. Albert Melin dans une lettre du 7 janvier 1915 demande à sa femme de lui expédier son appareil photo : « Aussitôt que tu auras reçu ma lettre, je voudrais que tu m’envoies mon appareil photographique. J’aurai l’occasion de prendre des clichés intéressants ».